À Londres, Bruxelles ou Paris, certains membres de la diaspora congolaise opposés à Kabila n’hésitent pas à avoir recours à la violence. Ce sont eux qui ont agressé le président du Sénat, Léon Kengo wa Dondo, le 31 décembre.
Léon Kengo wa Dondo venait à Paris avec sa femme et son fils pour passer le réveillon en famille… Il s’est retrouvé dans une chambre d’hôpital. Rien de grave. Quelques jours d’examens médicaux. Mais le président du Sénat congolais a eu chaud. Le 31 décembre, à 16h30, à la gare de Bruxelles-Midi, Kengo monte dans un train rapide pour Paris. C’est sans doute là qu’il est repéré par un compatriote. Peut-être un guetteur… À 18 heures, à son arrivée à Paris, gare du Nord, une dizaine d’hommes – « entre 28 et 35 ans », selon un témoin – lui tombent dessus et le rouent de coups. Il est notamment frappé à la tempe. « À son âge, 76 ans, le coup aurait pu être fatal », murmure un de ses proches. Avant de s’enfuir, ses agresseurs prennent le temps de filmer leur victime, assise groggy dans une voiture, la bouche en sang. Sur internet, les images sont légendées : « Une pluie de coups s’est abattue sur l’éternelle troisième voie. »
En RDC, la « troisième voie », c’est l’opposition modérée. À Kinshasa, Kengo en est la principale figure. En 1994, après une cohabitation impossible entre Mobutu et Tshisekedi, Kengo a accepté le rôle ingrat de Premier ministre de compromis. Le 20 décembre dernier, trois semaines après le duel électoral entre Kabila et Tshisekedi, Kengo – qui réclamait pourtant l’annulation du scrutin – a accepté de venir à la prestation de serment du président Kabila. Pour beaucoup de tshisekedistes, c’est le signe que Kengo est un traître qui négocie secrètement avec Kabila… Ce que rien ne prouve.
Boxeurs
Le président du Sénat a-t-il été agressé par les tshisekedistes de Paris ? Pour le gouvernement congolais, cela ne fait aucun doute. Pour l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), c’est totalement faux. Comme Kengo a porté plainte à Paris, l’enquête de police le dira. Mais une chose est sûre: les boxeurs de la diaspora congolaise n’en sont pas à leur coup d’essai.
La liste des victimes s’allonge. Entre eux, leurs agresseurs s’appellent des « combattants »
Le sénateur She Okitundu (Londres, octobre 2006), l’opposant Vital Kamerhe (Montréal, mai 2011), le général Didier Etumba (Paris, juin 2011), le président de la commission électorale, Daniel Ngoy Mulunda (Le Cap, novembre 2011). Sans parler des musiciens pro-Kabila, comme Koffi Olomidé ou Werrason, qui sont menacés à chaque fois qu’ils veulent organiser un concert hors du Congo… La liste des victimes s’allonge. Entre eux, leurs agresseurs s’appellent des « combattants ». Ils cherchent à terroriser les Congolais trop « tièdes » à leurs yeux et à attirer l’attention du monde sur le régime Kabila. Et ils ont un martyr : Armand Tungulu. Le 29 septembre 2010, à Kinshasa, ce Congolais de Bruxelles a jeté une pierre contre le convoi du président Kabila. Trois jours plus tard, il a été retrouvé mort dans une cellule du camp Tshatshi de la garde républicaine.
Y a-t-il un lien? Le 12 septembre dernier, lors d’une visite du président rwandais Paul Kagamé en France, un Congolais de Paris a perturbé la conférence de presse de plusieurs de ses ministres et s’est fait rudement rosser par la sécurité rwandaise. Ce Congolais appartient à l’Apareco, le parti d’Honoré Ngbanda, qui a été le « Monsieur Sécurité » de Mobutu et qui vit aujourd’hui en exil. Le même jour, une trentaine de manifestants congolais opposés au chef de l’État rwandais ont incendié un véhicule sur le périphérique parisien. Pour beaucoup de « combattants », les régimes de Joseph Kabila et de Paul Kagamé sont une seule et même cible. Bref, ce mouvement « combattant » peu structuré mais violent ne se réduit sans doute pas aux tshisekedistes de la diaspora congolaise.
Plus de 100.000 personnes ont fui les violences dans la région orientale de la République démocratique du Congo (RDC) depuis la présidentielle contestée du 28 novembre dernier, a indiqué vendredi le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR).
« Le regain de violence, impliquant des troupes du gouvernement, les forces des FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda) et des groupes de défense locaux, dans la région orientale et instable de RDC a obligé plus de 100.000 civils à abandonner leur foyer depuis novembre dernier », a déclaré un porte-parole du HCR, Adrian Edwards, lors d’un point presse.
« Nous sommes très inquiets des conséquences de cette violence », a-t-il ajouté, précisant que rien ne permettait d’affirmer que ces personnes avaient pu retourner chez elles.
Le HCR estime ainsi que quelque 35.000 personnes ont été déplacées au Nord-Kivu lors d’affrontements entre milices sur les territoires de Walikale et de Masisi, des violences durant lesquelles 22 personnes ont été tuées et un nombre inconnu de femmes ont été violées.
Au Sud-Kivu, les attaques dans le territoire de Shabunda ont conduit 70.000 personnes à quitter leurs maisons.
La majorité des déplacés vivent dans des familles d’accueil, dans des campements de fortune bondés, ou dans des écoles occupées, selon le HCR qui a envoyé sur place une équipe d’experts pour évaluer leurs besoins.
Certains des déplacés ont expliqué au HCR qu’ils étaient victimes de « travail forcé, de harcèlement et qu’ils avaient subi des violences ».
M. Edwards a expliqué que les experts onusiens ne pouvaient pas se rendre dans tous les endroits où se trouvaient les déplacés pour des raisons de sécurité.
La réélection contestée du président Joseph Kabila en novembre dernier a provoqué des tensions et des violences. La crise électorale se prolonge à travers les législatives, qui font elles aussi l’objet de nombreuses contestations